Entretien d'embauche métallique [PV Héphaistos - 343]

Alyvan poussa un long soupir et releva la tête vers son plafond, admirant pendant quelques minutes de vide sa netteté immaculée, avant de se masser la tempe de sa main droite. L’inactivité allait le rendre totalement fou ! Certes, il avait obtenu la possibilité de continuer à mener ses rendez-vous depuis son appartement de fonction et remplissait de la paperasse à vive allure …. Mais quel ennui de ne pas pouvoir se déplacer à sa guise, et de devoir rester aussi immobile que possible … Le pire étant qu’il n’était pas quelqu’un de très actif, après tout, il avait passé l’essentiel de son existence dans des laboratoires, mais le simple fait de pouvoir se déplacer, même de quelques mètres seul avait une espèce d’aura réconfortante qu’on ne comprenait qu’une fois qu’on en était privé, hélas pour lui. Bien sûr, c’était pour le mieux, et il comprenait parfaitement les raisons de ce menu sacrifice à sa santé. Cela ne l’empêchait pas de pester intérieurement contre cette inertie qui lui pesait. Foi de wroonien, dès qu’il serait en état d’être transportable, il prendrait la première navette et irait au Sénat en aéro-fauteuil s’il le fallait ! Le temps était un luxe qu’il n’avait pas, pas alors que la République entière grondait et se déchirait !

Déjà, une fois sorti de sa cuve de bacta, le xénobiologiste avait dû affronter la tempête sur Wroona, passant des heures à convaincre, depuis son lit de douleur, son gouvernement de ne surtout pas entreprendre d’action hâtive, y compris contre l’Ordre Jedi, l’assurant que ses membres avaient fait tout leur possible et qu’il valait mieux attendre d’en savoir plus sur les circonstances des événements tragiques survenus sur Mustafar. Mais cela avait donné du grain à moudre à ses opposants, surtout son ancien adversaire aux élections sénatoriales, qui avait fait le tour des holo-plateaux en distillant son venin coruscanti, appelant sans réserve à un soutien fort au Chancelier pour que celui puisse prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger la République et Wroona en particulier. Autant dire que le trentenaire n’avait que modérément apprécié, autant le discours que l’inélégance du geste, puisqu’il était tout de même dans un état grave et hospitalisé, donc incapable de répondre. Résultat des courses, il avait dû se résoudre à faire ce qu’il détestait, à savoir télécommander son géniteur pour que ce dernier use de son influence afin de calmer les tribus wrooniennes. Cela s’était révélé efficace, et le calme revenait dans les esprits et les mots, mais dépendre ainsi de celui qui l’avait contraint à sa jeunesse douloureuse était toujours difficile à accepter, même si leurs rapports s’étaient considérablement améliorés. Restait donc à terminer le travail local puis à s’enquérir du capharnaum coruscanti … tout en continuant ses propres manœuvres.

C’était dans ce but qu’il avait demandé discrètement aux services secrets d’approcher des agents capables d’enquêter sur ses affaires en cours, à savoir les étranges accidents qui se succédaient dans la République, sans coupable ou avec des responsables incapables de se souvenir de quoi que ce soit, et dénués de mauvaises intentions. Certes, il avait contacté l’Amirale Draimas et ne doutait pas qu’elle avait lancé des investigations, mais au vu du tir de barrage nourri qu’elle supportait suite au massacre de Sluis Van … Elle avait peut-être, à ce moment, d’autres cathars à fouetter, et peu de temps pour superviser une enquête qui devait sembler bien secondaire, avec la menace mandalorienne au pinacle. Il songeait aussi à avertir Nathanael mais pareillement, le Chevalier de l’Explocorps avait probablement suffisamment à s’occuper avec la mort du Grand Maître de son Ordre … Bref, avant qu’il ne parte pour Coruscant, il était urgent qu’il mette en branle quelques paires de bras, et ce y compris si ces derniers étaient métalliques.

Avec un rien de perplexité, il relut le rapport de son agent, détaillant le curriculum vitae du visiteur qui n’allait pas tarder à arriver. Il ne recevait pas tous les jours un droide ! A vrai dire, l’espace d’un instant, Alyvan se demanda quels étaient les bonnes formules de politesse, pour s’adresser à un être … pas exactement non sensible, enfin si, mais … non organique, voilà. Bon, il se contenterait du minimum et de faire dans le classique, comme cela, il ne pouvait pas se tromper. Une voix vint interrompre ses réflexions protocolaires, pour signaler l’arrivée imminente de celui qu’il attendait. Le Sénateur se cala donc au mieux sur le divan qu’il occupait, sa jambe blessée coincée dans un patient échafaudage métallique et entourée de moults bandages fleurant bons les produits pharmaceutiques avant d’indiquer aux deux gardes présents dans l’entrée d’ouvrir. Pas question, dans son état, de recevoir sans un minimum de sécurité. Cette dernière avait été considérablement renforcée, d’ailleurs, dans les bâtiments officiels, et la garde d’élite était répartie à tous les étages, tandis que chaque mouvement ou communication faisait l’objet d’une surveillance accrue. Le droide arriva finalement, et Alyvan afficha son habituel sourire bonhomme :

« Ah, vous voilà, entrez, entrez, je vous en prie. Et j’espère que vous ne m’en voudrez pas de ne pas me lever pour vous saluer, mais j’en suis pour le moment plutôt incapable.

Héphaistos – 343, c’est bien cela ? »

Il l’observa un moment, notant le caractère très arriéré du modèle de châssis, avant de continuer :

« Avant de poursuivre, je tiens à préciser que cet entretien a un caractère strictement confidentiel. On m’a dit beaucoup de bien de vos … qualifications et méthodes, mais je tiens tout de même à appuyer ce fait. Il s’agit d’une affaire délicate, qui risque de vous envoyer assez loin dans la Bordure, aussi j’aimerai savoir immédiatement si de tels termes vous conviennent.

Le paiement sera en conséquence, évidemment. »

Les agents d'un sénateur m'avait approché il y a peu. L'homme politique semblait vouloir faire appel à mes services. j'avais donc laissé Cabiro et Charis au vaisseau, inutile qu'il ne sache que j'ai une famille et donc, un moyen de pression éventuelle. Je m'étais donc présenté dans le building du di sénateur, un bâtiment comme il en avaient des milliards sur cette planète qui est Coruscant. Les hôtesses wrooniennes d'acceuil furent assez surprise de me voir, cela dit, je n'avais pas mit à jour mon chassis depuis bien longtemps.
Un garde me guidais à travers l'immeuble, la garde semblait des plus importantes... J'avais bien fait le lien depuis mon arrivé avec les informations venu de Mustafar, le sénateur wroonien y avait été blessé semble t'il.
En entrant dans le bureau du sénateur, mes hypothèses furent validé au vu de l'état du sénateur. Le sénateur semblait m'analyser, et ensuite en vint au cœur de son invitation.
Ainsi, il souhaitait que j'enquête discrètement sur la frontière.
"Je comprend parfaitement, sénateur. je saurais faire preuve de discrétion comme vous le souhaité." Je débutais ma réponse de ma voix grave métallique. "Je connais assez bien la frontière, sénateur, m'y déplacer ne sera pas un problème. Sur quel fait souhaitez vous que j'enquête?" Je lui demandais.
Il serait probable que l'enquête porte sur l'incident de Mustafar, mais cela pourrait être tout aussi éloigner.

Un instant, Alyvan se demanda s’il ne commettait pas une erreur grossière. De manière générale, il avait horreur de faire appel à des intermédiaires non-wrooniens, ou en tout cas, avec lesquels il n’avait pas un minimum de liens … et de prises. L’avantage d’un agent du gouvernement, c’était qu’il était entraîné pour ce type de procédure, et avec sa famille dépendant de ses employeurs pour sa subsistance, il était tenu à une certaine efficacité. C’était le contrat : soyez entièrement dévoués à Wroona, et Wroona vous le rendra. Et avec des Jedi, il y avait quelque chose d’encore plus pratique : ils étaient pratiquement incorruptibles, et du moment qu’on arrivait à les convaincre du bien-fondé d’une entreprise, ils en devenaient des serviteurs zélés. Le Sénateur admirait cela chez eux, tout en reconnaissant d’une manière moins charitable que cela en faisait des bras armés particulièrement pratiques … Du moins, quand on savait comment les brosser dans le sens du poil. Enfin de la Force. Bref. Quand on savait s’y prendre avec eux … et qu’on leur demandait d’intervenir dans des cas précis. S’ils étaient des agents doués, ils avaient leurs exigences, qui rendaient certaines actions assez incompatibles avec leur code moral. Dans ces cas-là, il fallait faire autrement. En l’occurrence, il avait alerté l’Amirale Draimas, et s’apprêtait donc à mener une enquête à titre personnel.

Pour autant, le xénobiologiste se tenait à ce qu’il pensait : l’inconvénient d’un mercenaire, a fortiori non-sensible, c’était l’aléa moral inhérent à ce genre de transaction. Fondamentalement, rien ne garantissait qu’il était aussi bon que ce que ses états de service suggéraient, sans compter le problème de savoir s’il s’acquitterait correctement de sa tâche. Et en plus, l’absence de sentiments visibles, de tics organiques rendait son interlocuteur du moment difficile à lire sans compter que forcément … Il n’avait pas mêmes attaches qu’un sensitif. D’un autre côté, il n’aurait sans doute pas les mêmes faiblesses : décemment, Alyvan était en droit d’estimer qu’il y avait peu de chances pour qu’une jolie gourgandine de la Bordure fasse tourner la tête d’un droide. Au moins un soucis de moins ! Est-ce que c’était aussi facilement achetable, cela dit ? S’il exerçait cette profession, sans doute, ou du moins, probablement un peu. Mais enfin, il ne servait à rien de se torturer : il avait tranché, il avait fait toutes les démarches, pas question de renoncer maintenant. Un éclat de douleur dans sa jambe malmenée lui arracha une grimace, alors qu’il cherchait à l’étendre plus confortablement, mettant un terme définitif à ses pensées et tergiversations.

« J’aurais besoin d’informations sur tout ce qu’a pu faire dans la Bordure Extérieure un certain Randall Sandron, de cette date à cette date. »

Il lui tendit un datapad, lui laissant le temps de le parcourir, avant de reprendre :

« D’après son épouse, il s’est rendu sur Nar Shaddaa pour voir une maîtresse, du moins c’est ce qu’elle semble avoir déduit de correspondances qu’elle a surprise entre son mari et une tierce personne.

Le fait qu’à son retour, notre wroonien ne se souvenait plus de rien, mais a fait dérailler un monorail, ce qui a coûté la vie à plusieurs dizaines de personnes innocentes.

Je pense qu’une enquête sur ce qu’il a pu vraiment faire durant ce laps de temps ne serait pas de trop, non ? »

Histoire d’appâter son interlocuteur, si l’envie de justice n’était pas suffisante, et elle l’était rarement chez les mercenaires … :

« Nos services couvriront vos frais, et la prime sera versée à votre retour, une fois les informations délivrées. Cela vous convient-il ? »

Les mercenaires avaient des avantages : ils ne posaient pas de questions inutiles. Du moins, la plupart de ceux qu’Alyvan avaient rencontrés étaient ainsi, avec un côté pragmatique qui, s’il pouvait choquer lorsqu’on était pas habitué, était bien agréable lorsqu’on se retrouvait du côté commanditaire de la barrière, pour tout dire. Jeune, le wroonien avait éprouvé une certaine répugnance à l’encontre de ces êtres qui se vendaient pour quelques crédits et tuaient pour une poignée supplémentaire. L’âge et l’expérience avaient contribué à lui donner une vision moins manichéenne, davantage celle d’un xénobiologiste que du jeune médecin qu’il avait rêvé de devenir, finalement. La nature ayant horreur du vide, il fallait bien que certains s’occupent de répandre la mort lorsqu’elle devenait nécessaire, car de toute manière, soit d’autres s’en chargeraient, soit les cibles continueraient leurs méfaits et parfois, la loi et l’ordre ne suffisaient pas. La République avait le bras long, mais pour les petites affaires … Mieux valait en rester à des moyens plus modestes, à savoir le recours à des agents qui ne se poserait pas de question et qui, s’ils étaient capturés, n’impliquerait aucunement leur gouvernement. C’était l’une des raisons qui avait poussé le politicien à faire appel à ce droide, à vrai dire, plutôt qu’à un espion des services secrets de Wroona. Si jamais il s’attirait des ennuis avec les Hutts, moyennement dénégation et effacement de données, il n’impliquerait pas la République. Et un mercenaire, ça ne faisait pas une bonne monnaie d’échange, alors qu’un ressortissant wroonien, si. Bref, l’un dans l’autre, il y gagnait et c’était le plus important.

Evidemment, ce constat sur le pragmatisme chevronné des mercenaires trouva bien vite son expression, puisque la seule chose que demanda l’unité 343 fut de savoir s’il devait ramener ses cibles vivantes. C’était logique, comme interrogation, tout en restant quelque peu gênant pour quelqu’un comme Alyvan qui avait tout de même, fut un temps, juré de protéger la vie et avait passé l’essentiel de son existence à l’observer croître, voire à chercher des moyens pour l’encourager. Et il répugnait, moralement, à ces exécutions sommaires. Mais comment donc Siri Draimas faisait pour dormir la nuit, bon sang ! Enfin, il était peu probable que l’Amirale soit troublée par le sang qu’elle avait sur les mains et les ordres qu’elle donnait. Voilà pourquoi elle était à sa place, et lui à la sienne … Même si parfois, le service de sa planète impliquait qu’il fit des choix douteux. C’en était un. Il savait que cela pouvait s’avérer nécessaire, et comme il l’avait souvent dit, Wroona passerait toujours en premier, peu importe ce qui devait être fait. Cela ne l’empêchait de ressentir un réel trouble alors qu’il prononçait ce qui pourrait bien se révéler être, dans peu de temps, une véritable sentence de mort :

« Dans la mesure du possible, je préférerais que ces personnes, si vous les capturez, soit ramenées vivantes ici, afin qu’elles soient traduites en justice et répondent de leurs crimes devant la population de Wroona.

Mais j’ai conscience que vous pourriez vous retrouver dans une situation qui rende cela … complexe. Dans ce cas, faites au mieux, et ramenez preuves et données prioritairement. Au pire, nous avons déjà un coupable. »

Froid, Alyvan ? Juste réaliste. Ce qu’il voulait, c’était savoir comment une telle faille de sécurité était possible. Ils avaient déjà appréhendé Sandron. Soit il paierait pour tous, soit il aurait de la chance, mais la population réclamait à corps et à cri des objets de détestation et la vengeance pour tous ces morts, il faudrait bien lui donner un os à ronger. Là encore, le wroonien n’était pas idiot et commençait à bien connaître les humeurs de la foule. Face à la rage, il n’y avait que deux solutions : du pain ou du sang. En l’occurrence, comme le pain ne manquait pas, ce serait la seconde option qui prévaudrait.

« Avez-vous déjà un plan en tête ? »

Le wroonien hésita, avant d’ajouter doucement, par acquis de conscience et honnêteté :

« Si jamais il devait vous arriver quelque chose chez les Hutts … Vous serez seul. Je n’ai pas l’intention d’entrer en conflit avec les cartels, et il est hors de question d’impliquer la République. D’où la prime de risque incluse dans le contrat.

Evidemment, si vous avez … des amis ou des proches que vous souhaitez m’indiquer, je pourrais leur transmettre la somme après un certain temps sans nouvelle. »

Bon, il ne savait pas vraiment si un droide avait ce genre de liens, mais c’est ce qu’il aurait proposé à n’importe quel organique alors … ça ne coûtait rien d’être poli et de le faire, non ?

Manifestement, le droide n’avait pas l’intention de s’étendre sur ses méthodes de chasse ni d’ailleurs de contester ses ordres en argumentant qu’il était difficile de ramener une cible potentiellement dangereuse en vie prioritairement. Quelque part, Alyvan aurait apprécié un employé plus dissert sur ses pistes ou ses différentes idées pour retirer cette épine qu’il avait dans le pied depuis quelques mois et qui ne cessait de le déranger, comme si son intuition lui soufflait qu’au-delà des conséquences pour sa planète, il touchait du doigt quelque chose de particulier, qui pourrait avoir des conséquences autrement plus grandes. Au vu de tous les affres qui frappaient la République, il fallait se demander s’il s’agissait de paranoia ou d’une volonté de croire qu’il y avait des liens là où il n’y en avait pas, ou bien simplement une envie de résoudre au moins un problème, même petit, même secondaire, enfin, très prioritaire pour Wroona mais qui, à l’échelle de la situation politique actuelle, n’était pas une priorité pour tout le monde.

C’était là tout son problème d’ailleurs : s’il avait alerté Draimas et les services secrets républicains, le Sénateur ne doutait pas qu’après les événements de Mustafar et Sluis Van, ces derniers allaient être déployés pour trouver des pistes à ce propos : remonter la chaîne des coupables, enquêter sur les positions mandaloriennes … Bref, sur des choses autrement plus pressantes et qu’il espérait voir advenir. Aussi crucial que soit cette enquête pour sa propre planète, il avait suffisamment de recul pour comprendre qu’en l’état, les priorités étaient ailleurs. Sinon, il ne se reposerait pas sur des moyens aussi … vulgaires. L’un dans l’autre, l’engagement de mercenaires pour fouiner librement dans les territoires hutts n’étaient pas dans ses méthodes ordinaires, et encore moins pour lui plaire, mais enfin … Il fallait bien faire avec ce qu’il avait, et comme il le fallait. C’est ainsi qu’il finit par hocher la tête à la demande de l’être métallique face à lui, avant de le congédier :

« Je vous en prie. J’attends de vos nouvelles très vite, et j’espère qu’elles seront prometteuses. Bonne chasse. »

L’espace d’un instant, il lorgna sur l’identifiant de compte que l’unité lui avait transmis, constatant qu’en effet, un droide pouvait avoir une famille ou au moins, des êtres à qui il tenait suffisamment pour vouloir leur transmettre de l’argent. Un bref moment, il se demanda qui pouvait bien être le mystérieux destinataire, ou les, avant de secouer sa tête. Après tout, cela n’avait sans doute guère d’importance. Le wroonien se contenta donc d’envoyer ledit identifiant à ses propres services en quelques secondes, leur spécifiant à quoi il devait servir, avant de reprendre ses datapads et de continuer à compulser ses notes vigoureusement. Guéri ou pas, il devrait se rendre bientôt sur Coruscant, et il valait mieux qu’il travaille son discours …

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